Retour d’expérience sur une mise en œuvre d’un management participatif

Récemment, j’ai été invité à un petit-déjeuner sur un retour d’expérience d’une transformation d’entreprise. Appelons cette entreprise la DDI (Dupond et Dupont Industrie), afin de préserver son anonymat.

Le récit

Il y a un an, suite à une grève du personnel, l’entreprise DDI est dans une impasse. Il y a une défiance nette vis à vis de la direction. Même certains managers sont en opposition avec celle-ci.

Ne sachant plus faire face, la direction de DDI se tourne vers un cabinet de conseil.

Après une phase d’audit réalisé par les consultants, la direction décide de travailler pour que les managers soient moins directif, moins présents dans les décisions de leurs collaborateurs.

Pour cela, le cabinet de conseil propose une transformation en trois étapes sur trois mois. L’idée forte est de mettre en place un management participatif.

La première étape est de redonner de la clarté au cadre. L’objectif est de partager le sens et l’objectif de l’entreprise. La direction lance donc les premiers ateliers sur ce sujet, animés par des leaders nommés parmi les différents niveaux hiérarchiques de l’entreprise. La démarche sera intitulée « retrouver performance et plaisir au travail ». Elle sera organisée en trois thèmes : les plannings, l’organigramme des opérations et l’organisation des travaux de maintenance. Ce sont les trois points ou s’accumulent les plus grosses difficultés de l’entreprise. Quatre valeurs ont émergé : bienveillance, accompagnement des équipes, ouverture d’esprit et autonomie. Pour finir la définition du cadre, quatre filtres sont définis : sécurité, rentabilité, satisfaction des clients et satisfaction des collaborateurs. Ces filtres seront utilisés pour valider les futurs propositions des salariés.

La deuxième étape est de redonner de l’autonomie aux salariés sur les propositions d’actions. C’est le principe même du management participatif. La direction met en place des ateliers par petits groupes impliquant l’ensemble des salariés, toujours animés par les leaders, pour proposer des actions de changement. Ces ateliers produiront 170 propositions d’actions sur lesquelles la direction en a validé 70 % en utilisant les filtres.

La troisième et dernière étape est la mise en place proprement dite des actions validées par la direction. À ce jour, toutes les actions sont soit terminées soit en cours. Il y a eu des changements de planning, des achats de chariots, des propositions d’achat de véhicules électriques…

Le bilan pour l’entreprise DDI est positif. L’entreprise a restauré la confiance. La majorité des managers a changé de posture, plus à l’écoute des collaborateurs. Évidemment, la direction sait qu’elle est très attendue sur le suivi des efforts, en particulier des actions encore en cours ou à venir. Pour le moment, elle trouve les salariés plus motivés et l’ambiance de travail plus sereine, avec comme conséquence moins d’absentéisme. De son côté, la médecine du travail constate des changements positifs quant au stress des salariés, lors des visites médicales.

Mes propositions pour la suite

La direction pourrait, avec ses salariés, définir la raison d’être et les valeurs de DDI. Ainsi, les décisions pourraient être prises et mises en œuvre directement par les salariés. La validation se ferait alors à posteriori, par la direction ou les collaborateurs. Cette validation se faisant sur l’adéquation des actions avec le cadre.

Cela aurait comme effet de continuer à autonomiser les équipes. Ce qui est dans la suite de la transformation déjà réalisée : après avoir délégué les propositions d’actions, c’est déléguer les décisions et leur mise en œuvre.

À terme, la direction deviendrait l’organe qui anime la raison d’être de l’entreprise au quotidien et se positionnerait sur les enjeux stratégiques et de visions. En ne prenant plus elle-même de décisions opérationnelles, elle ne serait plus soumise à l’escalade d’engagement. Et d’autre part, elle serait plus attentive aux signaux faibles et aux nouvelles opportunités business, comme l’a si bien expliqué Shoji Shiba dans son livre Management selon Shiba.

L’entreprise se dirigerait alors vers une libération, décrit par Frédéric Laloux dans Reinventing Organisations.

La difficulté pour la direction sera d’arriver à faire confiance et de lâcher du contrôle en laissant les employés décider et agir.

Les bénéfices pour l’entreprise ainsi que ses salariés sont énormes. Pour les salariés, il s’agit de bien-être au travail. Pour la direction, elle verra une accélération des prises de décision, de l’adaptation rapide aux changements et de la performance.

Olivier Albiez

Je suis artisan logiciel et coach agile chez Azaé, passionné des méthodes de travail et de l’auto-organisation dans les entreprises. Curieux par nature, je suis toujours à la recherche de ce qui peut améliorer le travail collectif d’une organisation. Je suis récemment co-fondateur de Deliverous. Je suis signataire des manifestes Artisans du Logiciel et Agile.